Quelqu'un m'a fait un canular téléphonique, en se faisant passer pour le consul de France en Albanie et j'ai marché ! Quelle naïveté... Heureusement, Ulysse poursuit son périple, j'allais écrire paisiblement... mais non, lisez ce qui suit. Alain n'ayant toujours pas la maîtrise du blogueur fou, m'a envoyé le message par mail.

Samedi 6 juin :

Ulysse est maintenant au Nautic Athlétic club de Corfou, avec salle de muscu, eau et électricité. Passage du relais, changement d'équipage et de capitaine Kradok le vrai retrouve Ulysse. Il a perdu son portable à l'aéroport d'Athènes. Cela va être difficile de le joindre. Les consignes sont passées, Alain ira en Albanie, voir les amis du pirate...

Dimanche 7 juin

la journée commence par un agréable bain portuaire pour repêcher les clés du bateau qui ont passé la nuit au fond de l'eau. Départ de l'équipage Dabadie . Midi appel de Jean sur mon portable d'Athènes, décidément le monde est petit et les Grecs honnêtes puisque le portable a été remis a la police de l'aéroport. Manquerait plus que maintenant tu me le paumes jean!!!

A part ces péripéties bien innocentes, la journée se passe agréablement par une visite de Corfou qui mérite vraiment la découverte. Après midi baignade, sieste et incursion voilière à Gouvia avant de revenir s'amarrer dans le port recommandé par les copains pirates de Jean. Si l'amarrage est parfait (encore faut il trouver ou accrocher un cordage!), la nuit est d'enfer because la route juste à coté !!

Lundi 8 juin

Je profite du petit matin enfin calme pour larguer les amarres et faire les manœuvres de sortie pas évidentes avec le vent qui me plaque Ulysse sur le quai, puis c'est le cap sur l'Albanie terra incognita. Après une navigation risée volvo, nous distinguons quelque méchante cité genre manhattan ou monaco ???!!! De plus près cela devient Beyrouth avant et après la guerre, que des immeubles de 5 à 8 étages d'un coté à l'autre de la baie . Ici on ne connait pas la crise et l'Albanie de demain se construit un avenir pour le meilleur et le pire.

Sarrande ou comment défigurer un littoral en quelques années

Sarrande ou comment défigurer un littoral en quelques années

Où s'installer? Aucun autre engin flottant n'étant visible sur la gauche de la baie, un lourd quai de béton existe bien, mais j'y verrai plutôt un porte avion qu'Ulysse . C'est pourtant le bon coin si l'on en juge les grands signes que nous adressent au moins dix paires de bras sur le quai. 3 minutes plus tard nous voilà amarrés les yeux levés vers plusieurs galonnés qui s'écartent devant un civil, manifestement le personnage le plus considérable .

Ulysse bien gardé au port de commerce

Ulysse bien gardé au port de commerce

ça y est, je panique, passeport, livret du bateau, carte vitale (non pas nécessaire), puis c'est l'attente. Le chef suprême a disparu avec tous mes papiers!! 5 minutes, puis 10, puis 15. Au bout de 20 minutes il revient et envahit Ulysse en me tendant une liasse qui réclame une dizaine de signatures. Finalement le grand personnage se dénomme Agim. C'est le responsable du port et surtout un agent touristique efficace. Il nous propose une visite guidée des environs avec un interprète français. Rendez vous pris pour le lendemain.

Il nous reste à découvrir cette ville étrange ou tout se construit à la diable avec une frénésie qui semble avoir eu enfin raison de siècles d'immobilisme. Quelles constructions! Des hôtels, des résidences à touristes et encore des hôtels, mais ou sont les touristes ? Ici c'est nous c'est à dire une paire... ben oui!

le best seller à Sarande en Albanie

le best seller à Sarande en Albanie

Mardi 9 juin

A 8heures se présente Aristote (on sent la proximité de la Grèce), notre chauffeur interprète pour la journée et sa fiat punto. Aristote parle un français impeccable. Il travaille à la mairie en qualité de responsable du tourisme. On peut donc dire que nous visitons la région de Sarande avec le ministre du tourisme. Au programme le site antique et médiéval de Butrini et la ville classée au patrimoine mondial de Giroskastar.

Girokastra et ses maisons couvertes de lauze

Girokastra et ses maisons couvertes de lauze

Journée bien remplie même si elle s'achève à 16 h. Je ne sais que dire à Aristote d'autant que nous n'avons pas négocié sa prestation ,lui aussi semble gêné,mais sachant le niveau des salaires locaux - sa femme enseignante gagne 350 euro, il nous explique qu'il n'y a pas de statut de la fonction publique et s'il y a un changement de gouvernement les fonctionnaires mis en place par le précédent sont priés de laisser la leur aux affidés des nouveaux dirigeants - finalement je lui donne 100 euro .

maison natale d'Enver Hodja

maison natale d'Enver Hodja

Vers 1 7 H nous appareillons pour Porto Palermo et sa baie divisée en 2 par un promontoire occupé par une forteresse bâtie par Ali Pacha en l'honneur de sa femme. Arrivée prévue vers 21 H,mais à 20 H des vents catabatiques nous assomment avec des rafales dépassant les 30 Nœuds. Enfin nous doublons le cap qui nous ouvre la baie salvatrice, mais catastrophe, les vents mieux canalisés y sont encore plus forts. Nous errons d'un bout à l'autre de la baie,finalement je décide d'ancrer au NW, zone indiquée abritée dans le guide nautique .Alors qu'il fait quasiment nuit , je largue le maximum de chaine dans 6 mètres d'eau , tout tient enfin, on va pouvoir souffler! Que nenni de véritables bramements de sauvages nous interpellent et nous sommes invités à dégager par deux individus courants sur le rivage dans un état d'extrême agitation. En fait ,nous sommes à 300m de l'entrée d'une base sous marine de la marine albanaise, plus exactement d'une ancienne base car on se serait déjà fait canarder. Je remonte l'ancre sans trop savoir où aller, ou plutôt pensant à un retour sur Corfou, le vent ne faiblissant pas. Mais aprés une nouvelle visite de la baie et d'un ponton de beton haut de 2 m avec des ferrailles saillantes, la colère me prend et je reviens me planter et encore plus près de la base ultra-ex-secrète. Nos amis nous gratifient de l'allumage d'un projecteur pendant une demie-heure mais, comme nous ne bougeons pas, ils feront comme nous, ils iront au lit!!

mercredi10 juin

Au matin c'est le calme plat. Nous nous rapprochons du gros ponton déserté des bateaux de pêche venus la veille s'y amarrer. Nous réussissons une manœuvre parfaite. Le plus dur c'est d'y grimper dessus (encore un ponton pour porte avions). Nous visitons le joli fortin cadeau offert à Mme Ali Pacha. La vue et la terrasse sont magnifiques, mais l'intérieur plutôt spartiate, pas une fenêtre!!

PORTO PALERMO après la tempête

PORTO PALERMO après la tempête.

L'eau cristalline (bonjour le cliché mais c'est vrai) me permet de découvrir un tombant sous le fort d'au moins 25 m et une vaste baume sous marine.

l'époque ou l'Albanie résistait à la terre entiere

L'époque ou l'Albanie résistait à la terre entiere.

A14 heures, cap sur Othoni que nous atteignons vers 19 heures. Mouillage devant la digue, alors que commence à se lever le vent de NW qui nous a assommé en Albanie. Cela vaut bien le restaurant de notre pote d'une taverna coquette, qui nous régale et nous renseigne sur la météo locale. Rien de bon sur deux jours. Une douzaine de voiliers sont là, consignés, occupés à renforcer les amarres

jeudi 11 juin

C'est comme on vous l'a annoncé, que du vent du NORD qui nous empêche de reprendre la route !! J'ai sorti l'annexe pour gagner le rivage le long de la digue, mais il est impensable d'y aller à la rame, n'ayant pas Denis Bonal sous la main (les connaisseurs apprécieront). Je me résous à oublier mon éthique, pour installer le moteur, et nous voilà tout aspergé pour gagner la grève salvatrice. Reste à planquer l'annexe pour éviter qu'elle ne décolle en notre absence.....

Quelles sont les nouvelles à Othoni ? Rien de bien excitant ,la capitainerie (on y est passé une dizaine de fois devant, mais toujours fermée ) n'a qu'une information à vendre : un avis de vigilance pour cause de présence d'un «grand blanc» dans les eaux locales. Bref la routine .

ile d'Othoni (sans commentaire

ile d'Othoni (sans commentaire)

Mais cette charmante île mérite qu'on la découvre, avec des sentiers qui, hélas, ne sont plus entretenus. Elle offre des paysages sauvages et spectaculaires et des villages plein d'authenticité où il doit faire bon venir se ressourcer dans une maisonnette aux murs blanchis à la chaux. Je m'essaye à un footing jusqu'à un hameau qui domine le port 4kms en côte (pour ceux qui croient qu'un raider en vacances ne s'entraine pas !). Je suis accompagné par un chienchien avec qui j'ai sympathisé.

vendredi 12 juin

Toujours bloqué par ce fichu vent qui ne s'est calmé que dans la nuit nous décidons une exploration du bord de mer à l'abri des falaises, et là nous découvrons mieux que des piscines de stars : des piscines naturelles aux eaux émeraudes. Je n'y tiens plus, combine, masques, palmes, ceinture de plomb et me voilà au paradis : une cigale de mer sous moins de 3m se laisse toucher pour finalement se replacer tout près je me régale avec des tombants de 15 à 20 m dans une eau d'une clarté étonnante. Mais pour cause de vent du nord la température est basse et je me gèle. Nous continuons notre visite en annexe pour aboutir sur une grotte sous marine et bien sûr je me remets à l'eau pour l'explorer. Après 30 m de nage je bute sur le fonds encore faiblement éclairé.

L'après midi nous vaquons à nos taches matérielles et ce foutu blog qui n'avance guère!! La tete étourdie par le vent qui ne veut pas nous dire quand il prévoit la pause je révise mes plans :si le nord ne veut pas de nous ,à nous le sud!

samedi 13 juin

Comme des voleurs nous levons l'ancre avant la baston. Direction Palaiokastrita, sur la cote ouest de CORFOU. La traversée s'effectue sous génois seul (merci le vent du nord ). Ce coin de l'île propose plusieurs mouillages magnifiques, mais le rivage est urbanisé, et tout dédié au tourisme (bateau à fonds de verre ,pedalos, etc). Bref, on ne s'y sent pas trop chez soi. Mais soyons justes les constructions s'intègrent relativement bien dans la végétation luxuriante (et oui la Grèce, ce n'est pas que des cailloux et la mer ). On se demande comment ces paysages ne brûlent pas, on ne voit pas de traces d'incendie.

PALAIOKASTRITA (Corfou)

PALAIOKASTRITA (Corfou)



C'est le moment de se ravitailler. Pour l' eau et le carburant il faut aller en ville. Les douches à bord, on ne connait pas trop!!!

Nous louons un véhicule pour une visite de l'intérieur et du nord de l'île. La journée a tout d'une réussite... sauf qu'avec moi, quand je n'ai plus de soucis, il est absolument indispensable que je m'en crée!! donc après l'épisode perte du téléphone à l'aéroport d'Athènes et récupéré par Jean, c'est au tour de la carte bancaire! En rendant la voiture je m'aperçois de la disparition de ma carte bleue. La gérante des locations téléphone à la station service ou j'ai acheté un liquide de refroidissement, rien pas de carte ... Je me retire sous la tente pour cogiter un plan b et m'interroger sur l'évolution de mon Alzeimer. Mais voilà que le gérante des voitures nous rejoint en scooter: tout va bien la carte était bien à la station service ! Journée pleine. Au lit et à demain!

lundi15 juin

Les vents contraires s'étant calmés ,nous reprenons la route du nord objectif les bouches de KOTOR , au Monténégro.

A la hauteur de l'ile d'Othoni, impossible de résister à l'appel de la baignade devant la plage sauvage sous les falaises.

Puis cap sur l'ile de Sazan en ALBANIE ,ce sera une traversée « risée volvo » la mer est étale. Peut être verrons nous plus facilement le célèbre aileron du « grand blanc ». Mais non ,juste deux grands dauphins assez distants d'ailleurs. La nuit tombe et je décide de continuer la route sous le ciel étoilé. La côte albanaise si imposante avec ses montagnes les pieds dans l'eau devient très discrète et ne présente qu'une cote rectiligne et sans relief. Quelques lumières éparses témoignent d'une timide occupation du bord de mer. Alors que chez nous les zones côtières sont surpeuplées, ici elles semblent n'offrir aucun attrait. La nuit se passe en douceur et nous continuons jusqu'à Bar point d'entrée au Monténégro .

mardi 16 juin

Après le vent fou des premiers jours, c'est désormais le calme plat question météo. C'est le moment d'explorer la côte, qui retrouve du relief aux confins du Monténégro : des criques invisibles de loin s'ouvrent devant l'étrave. Vers midi la tentation est trop forte, malgré un fond de gros blocs nous mouillons pour une baignade qui nous console de l'absence de vent. Faute ne n'avoir pu pêcher la moindre ablette, nous ne serons pas bredouilles : des grappes de moules (taille espagnole) s'accrochent aux rochers avec de gros coquillages. Un quart d'heure plus tard elles sont dans la casserole. Manque que le vin blanc! Les coquillages s'en sortent mieux ne sachant les préparer, ils repassent à l'eau.

Arrivée dans le grand port de BAR ou nous attend l'épreuve des formalités d'entrée! Jusqu'à l'amarrage c'est un sans faute ,après c'est moins brillant : 5 minutes après notre débarquement déboule sur le quai un grand escogriffe qui m'apostrophe en bachi bouzouk. Je lui sors mon anglais pur « oxford of corrèze ». Peine perdue!! Finalement il se calme et m'entraine au bout du quai dans un algeco, son repère. Un galonné s'y terre , policier apparemment en recherche de fraicheur climatisée. Le grand sort un barème et je lui indique la longueur d'Ulysse en pointant sur le barème, cela lui déclenche une sorte de réflexe conditionné : « koko » dit-il. Je recommence...même effet! Je l'appellerai donc « koko ». Puis les deux bougres entreprennent de grandes explications, tout en pointant du doigt par la porte « kapetenia ». Et nous voilà vers la sortie du port à chercher la « kapetenia ».Il y a bien le « policia bar » mais pas la « kapetenia ».

Nous errons maintenant en ville et faute de mieux nous refaisons le plein d'euros dans une banque. Une demi heure plus tard et parfaitement par hasard nous trouvons enfin la kapetenia pour la délivrance d'un permis de naviguer. Un fonctionnaire plutôt avenant nous fait remplir les formalités préalables car il nous faut maintenant contacter la police et la douane pour faire valider la liste d'équipage qui ouvrira l'attribution du permis mais avant cela il faut acquitter le prix du permis : bien entendu on ne paye pas à la « kapetenia », il faut le faire dans une banque! Pas de problème on en connait une à coté. Après deux imprimés ratés et une demi heure plus tard, nous avons en main le fameux reçu.

Cap vers le « policia bar ». C'est ici qu'officie le placide galonné déjà vu chez « koko ». J'ai dû faire une grosse erreur technique en disant que nous venions d'Albanie !!!! Placide a commencé à transpirer du képi et a entrepris une vingtaine d'aller et venues dans un autre local avec nos passeports tout en nous faisant comprendre à chaque passage que notre affaire progressait. Une heure et quart plus tard, épuisé mais content, fort d'avoir résolu tous les problèmes Placide nous rend nos passeports agrémentés d'un tampon,reste la douane elle est à coté mais je ne m'en suis pas rendu compte!! encore un quart d'heure et quand nous avons tous les visas et tampons possibles nous nous heurtons à la porte de la « kapetenia » fermée entre temps!!! L'épisode se poursuivra demain!!!

Retour au bateau et au bout du quai « koko » veille et nous redemande les passeports ,satisfait du nouveau tampon et de la liste d 'équipage visée par la douane il me remontre son baréme en poussant son cri favori « koko » ,je paye donc 33 EUROS ou plutot « kokos »,c'est la conclusion à laquelle j'ai abouti.

Encore 50 m et enfin nous voilà sur ce brave ULYSSE prêts pour une nuit de récupération! C'était trop beau ce calme trompeur, revoilà « koko » et un de ces acolytes qui moulinent des bras et me font comprendre qu'il faut absolument m'amarrer sur 2 pendilles. Je démissionne lâchement et laisse les professionnels agir (précisons qu'il n'y a pas un souffle d'air !!!). Résultat après de furieuses manœuvres de cordages nous nous retrouvons à 2m50 du quai avec un cordon électrique à la limite de la rupture ! mais « koko » m'installe une passerelle ,finalement ce n'est pas un mauvais garçon ! Il s'en va ,je desserre tous les cordages et bonne nuit!