La sortie de Kayio et le passage du cap Ténaro, point le plus sud de la Grèce furent vraiment musclés. Dès le lever du jour nous avons levé notre mouillage précaire, limite dangereux à 40 mètres de la plage, et, dans 30 à 35 nœuds de vent d'est, gagné le large sous la pluie et dans les déferlantes. Les deux voiliers encore mouillés à l'extrémité nord de la baie ont du se dire que nous étions des mangeurs d'écoutes invétérés. Après le passage du cap, la mer s'est apaisée mais les rafales, à la foi violentes et soudaines, nous obligeaient à beaucoup de doigté à la barre pour ne par être surpris et ménager le gréement ou les voiles bien réduites.

cap Grosso

Subitement deux heures après, à l'approche du cap Grosso, le vent est tombé complètement nous obligeant à mettre en route le moteur pour une heure. Progressivement il est revenu, beaucoup moins fort, mais exactement contraire. Nous nous sommes donc lancé dans un louvoyage qui devait durer une quarantaine de milles. Heureusement Poséidon veillait, et une lente rotation de la direction du vent nous a finalement permis d'atteindre le dernier grand cap du Péloponnèse, Akritas, sur un seul bord et après une grande courbe, alors que la pluie disparaissait complètement, et que le soleil faisait de timides apparitions. Oh, merveilleuse surprise, nous sommes passés à moins de cinquante mètres d'un groupe de baleines soufflantes dont deux nous ont gratifiés d'un impressionnant saut, complètement hors de l'eau, suivi d'un plouf retentissant. Malheureusement, le photographe, pourtant vigilant, n'a pas réussi à saisir ces derniers. Puis le troupeau s'est laissé distancé en vaquant à ses occupations favorites.

baleine

porte sud

L'arrivée à Méthoni, en passant au milieu des nombreux ilots du secteur, est magnifique. Cette ville fortifiée depuis le 13ème siècle, qui a connu les francs de retour des croisades, les vénitiens puis les turcs et à nouveaux les vénitiens est un des hauts lieux de la guerre d'indépendance de la Grèce avec notamment les exploits de l'amiral Miaoulis (déjà cité dans le billet intitulé "le début de la fin", vous suivez ?) avec la technique du "brûlot" qu'il maitrisait parfaitement, et surtout la bataille de Navarin juste au nord, le 20 octobre 1827. Un ruse permit à une petite flotte franco-anglaise de détruire à Pilos la flotte égypto-turque d'Ibrahim Pacha, beaucoup plus nombreuse, conduisant, en quelques mois, à la fin de l'occupation du Péloponnèse par les ottomans. L'amiral anglais Codrington, après cette brillante et décisive victoire, fut désavoué ("un déplorable malentendu") par son roi George IV qui voulait ménager les relations futures avec la Turquie, mais le résultat était acquis, point-barre.

citadelle et rade

La forteresse de Méthoni, construite, détruite et souvent remaniée au cours des siècles, est extrêmement complexe et abritait une importante ville médiévale aujourd'hui disparue. Il ne subsiste que les fortifications, partiellement en ruines et la tour sud, turque, relativement en bon état avec son petit pont restauré comme la porte d'accès depuis la citadelle. Les français y ont laissé des traces, en particulier Geoffroy de Villehardouin, chevalier champenois, qui la fonda en 1204. Puis en 1828, année où le général français Maison la repris au turcs, et la fit partiellement reconstruire en modernisant l'accès avec un pont de 14 arches en parfait état.

Pont général Maison

Ce samedi, après une excellente nuit réparatrice, la météo nous annonce des vents de nord ouest trop forts pour entreprendre un long louvoyage de 70 milles vers Zante (ou Zakinthos, l'ile aux tortues), qui devrait être notre prochaine et dernière escale grecque. Alors, relax dans ce mouillage calme et protégé, lecture, écriture sont au programme