Nous sommes toujours à Milos, depuis maintenant quatre jours, et cette ile vaut le voyage.

- L'abri est excellent, mais ce n'est pas la météo actuelle qui nous en fait la démonstration, il n'y a plus de vent. Cela devrait changer ce dimanche avec le retour du meltem pour au moins deux jours. Nous verrons bien.

- La ville possède toutes les ressources dont nous avons besoin, en particulier une multitude de tavernas accueillantes, mais aussi, en dehors des besoins alimentaires habituels, quelques nourritures intellectuelles et spirituelles, en particulier la presse française du jour ou presque. Marie y a trouvé son "canard enchainé " favori dès le jeudi, un exploit ! Il y a aussi un shipchandler qui semble très bien achalandé, mais nous n'avons besoin de rien pour le moment.

passerelles

Cependant, le manque d'une passerelle pour débarquer s'est encore fait sentir, car, en raison des sillages des ferries, nous ne pouvons pas rester assez proches du quai pour enjamber l'espace de sécurité nécessaire. Après consultation de l'un des fournisseurs de services divers qui arpentent le port en permanence, celui-ci a emmené Alain dans son propre camion, jusque chez un fournisseur de matériaux pour le bâtiment, et a servi d'expert et de négociateur pour la fourniture d'une planche adaptée (0.25x0,04x4m). La livraison sur le quai est intervenue le lendemain matin et il n'y avait plus qu' à la poncer pour éviter les échardes, la couper à la bonne dimension, percer les trous nécessaires pour la fixer et l'équiper des bouts d'amarrage et de levage. La chute restante, équipée de la même façon, permettait même d'avoir deux passerelles adaptées à différentes configurations de port. Mais un voilier anglais arrivé le même soir avait le même problème que nous. La "chute" lui a été bien utile, au point qu'il nous l'a achetée, et est presque devenu un copain. Finalement c'est aussi bien, car deux passerelles à bord, c'était un peu encombrant. Ce petit travail a été la première occasion de sortir les outils électriques de leur coffre et, pour 15 euros net transport compris, nous avons accru le confort et la sécurité d'utilisation de Dartag dans des proportions considérables.

- Les liaisons avec Athènes sont faciles par ferry et cela nous a bien rendu service pour accueillir Marie-Jeanne Algéo, fidèle lectrice de nos billets, qui n'a pas pu résister à l'appel de la mer Egée, et nous a rejoints jeudi soir. Le terminal des ferry est à 100 mètres du port de plaisance et c'est donc bien pratique. L'usage de la passerelle a donc eu immédiatement un effet doublement bénéfique.

- Mais surtout, comme dans toutes les iles grecques les villages sont magnifiques, habités, vivants, remplis d'églises de toutes tailles et de toutes formes, mais les invariants sont toujours les mêmes: couleurs blanc et bleu, iconostase et décoration intérieures d'une grande richesse.

maisons de pêcheurs

Les petits villages de pêcheurs installés au ras de l'eau à Klima, au débouché du talweg descendant de la montagne bordant le nord du golfe, sont malgré tout vraiment originaux. Leur implantation est très ancienne, ainsi que le montre l'importance des vestiges de l'antiquité et même de la préhistoire, qui se trouvent sur le même site.

mosaïque

On peut aussi citer une touche de décoration fréquente, et encore jamais vue dans les iles visitées: de nombreuses mosaïques de facture contemporaine ornent les sols des jardins ou espaces publics. Il s'agit d'assemblages de galets calibrés et les motifs sont obtenus par les différences de couleur de ceux-ci. Sur une ile dont les roches sont si variées, il est possible de faire ainsi des œuvres d'art polychromiques avec juste de la patience et un peu de goût, en utilisant les matériaux trouvés sur les plages.

La richesse est également archéologique, et le théâtre vieux de 2600 ans est plutôt en meilleur état que dans d'autres iles. Il sert d'ailleurs chaque année pour un festival d'été. Il est tout proche du site où a été découvert en 1820, par un cultivateur qui voulait dégager une grotte dans son champ, la merveilleuse "Venus de Milo" exposée au Louvre.

Vénus

Cette statue de 2 mètres de haut, constituée de deux morceaux assemblés avec des chevilles en fer, a fait l'objet d'un conflit byzantin et d'un incroyable concours de vitesse entre diplomates qui souhaitaient se l'approprier. Finalement, ayant réussi à décourager ses rivaux lors d'enchères aussi folles qu'informelles et parfois musclées, c'est l'ambassadeur de France à Constantinople qui a eu le dernier mot. Façon de parler, car les mots ont été accompagnés de violences, au cours desquelles la statue, entière lors de sa découverte, a perdu ses deux bras qui n'ont jamais été retrouvés. Elle a heureusement gardé toute sa tête, d'ailleurs fort belle. En fait il ne s'agit pas de Vénus mais d'Aphrodite et le site de la découverte est Tripiti, petite commune située entre Klima et Plaka, la capitale de l'ile. Elle a été offerte par l'ambassadeur au roi Louis XVIII qui l'a remise au Louvre. Un copie parfaite, en plâtre, faite par les services du Louvre, est exposée dans le délicieux petit musée archéologique de Plaka. La surface non encore fouillée est immense et les esprits simples comme nous peuvent imaginer que d'autres découvertes aussi merveilleuses restent possibles.

musée

Milos a une autre particularité passionnante: c'est la richesse des minéraux qui constituent son sol. Les mines et carrières de perlite, bentonite, barite, kaolin, obsidienne, pouzzolane, silicates variés, métaux rares et précieux,....et d'autres merveilles encore, existent depuis l'antiquité, et sont exploitées aujourd'hui par une compagnie minière qui a créé, en 1998, un musée des minéraux et des mines de Milos, évoquant la géologie, et l'histoire de l'exploitation de ces minéraux précieux. Aujourd'hui, d'immenses carrières existent dans le nord et l'est de l'ile, et les industries qui leur sont liées sont très actives, avec d'immenses installations sur lesquelles nous sommes tombés presque par hasard, avec notre petite Chevrolet de location. En effet le paysage est tellement bouleversé par ces immenses excavations, que les routes sont détournées au gré de l'ouverture de nouvelles exploitations ou des réhabilitations de celles qui sont abandonnées, et notre GPS avait un mal fou à s'y retrouver.

Tuff volcanique

Auparavant nous avions visité, à Sarakiniko dans le nord de l'ile, un site de falaises et roches blanches étincelantes absolument extraordinaire. Ce paysage est quasi lunaire, et les reliefs créés par l'érosion éolienne tout à fait surprenants. Ce matériau, sans doute assez friable, compose des formes très variées et parait par endroit comme sculpté en arabesques aléatoires et en colonnes ou statues presque régulières. Il s'agit, d'après nos guides, d'un tuff volcanique. Naturellement, le nom scientifique et la composition minérale d'une telle roche nous a échappé. Si cela inspire l'un de vous, nous serions bigrement intéressés par la résolution de cette nième énigme. Merci d'avance, avec nos excuses pour ces multiples sollicitations. En cette après-midi du 15 août, il y avait pas mal de monde à cet endroit, notamment lorsque l'accès à la mer est facile, mais le site est tellement grand qu'il était encore possible de s'y promener et de faire des photos en ayant l'impression de l'avoir pour soi. On en vient même à se demande à quel genre de film un tel décors naturel pourrait servir.

Provathas cote sud

Une dernière petite expédition dans le sud de l'ile, avant de rendre la Chevrolet, ce dimanche matin, nous a permis de compléter notre vue terrestre de cette formidable Cyclade.

Nous devrions rester encore quelques jours à Milos avant de regagner le continent dans le milieu de la semaine.