Evadé
Par dartag le vendredi 19 juin 2020, 12:11 - 2020 Septième hiver aux Antilles - Lien permanent
Le 11 mai, la chaleur et le beau temps aidant, fut un chouette début de déconfinement. Il était temps, dans ces îles où il n’y a pratiquement pas eu de malade, quelques hospitalisations et où les décès se comptent sur les doigts d’une main. Mais les réflexes de notre brillante administration l’empêchent de faire confiance aux administrés et surtout sa fâcheuse tendance à l’égalitarisme ne lui permet pas d’imaginer qu’un voilier, après deux mois d’isolement de l’équipage, donc risque nul, puisse naviguer pour le plaisir alors que les « terriens » peuvent circuler dans un rayon de 100 km. Donc on interdit de naviguer quand même !!! Mais aussi de se baigner autour du bateau. Une équipière a été verbalisée de 135 € parce qu’elle nageait à quelques mètres de son voilier !
Il a fallu attendre le 22 mai pour apprendre que, si l’on avait une raison impérieuse, on pouvait demander l’autorisation de naviguer au « Directeur de la Mer » par l’intermédiaire du CROSS Antilles pour un trajet précis, de jour uniquement, sans escale, sans mouiller et sans débarquer. Les arrêtés préfectoraux publiés sont des monuments de jargon administrativo répressif inapplicables. Bien sûr certains plaisanciers ont demandé et obtenu ces dérogations, puis en ont fait ce qu’ils voulaient, d’autres, dont bibi, se sont offert le culot de ne rien demander et de se faire de petits plaisirs quand même, avec prudence et discrétion par exemple en se baignant la nuit !
Le radar dans la baie de Pointe à Pitre montre le nombre de voiliers attendant le signal du départ
Certains, lassés, préfèrent embarquer leur bateau sur un cargo pour rentrer en Europe.
Mon voisin de mouillage porte le nom de l’héroïne du roman que je viens de terminer et qui est aussi un titre de Jazz Country archi célèbre en Australie, son pays d’origine. Coïncidence amusante.
Cette épopée se situe dans le bush australien et met en scène une héroïne qui se bat comme une lionne pour conserver le ranch de sa mère. Celui-ci devient, cinquante ans plus tard, la propriété d’une jeune artiste veuve, venue de Sydney. Cette dernière découvre les carnets intimes de Mathida et se prend d’affection pour son histoire au point de tout abandonner pour y vivre. Roman poignant, dur, plein de drames, de tendresse et de rebondissements, qui se lit presque d’une traite.
Il ne fallait pas pour autant oublier de célébrer dignement le 1er mai avec un brin de fraîcheur…
.. et un élastique qui se transforme en cœur en sautant sur la table du carré.
Après une jolie traversée clandestine dans l’alizé modéré
Nous avons retrouvé le mouillage de St Louis et tous ceux qui y étaient restés
L’animation du village reste très modeste sous le soleil vertical.
Et la coupe « confinement » devient quasiment révolutionnaire
Les voiles hissées, ceux qui repartent en Europe défilent dans la cacophonie des cornes de brumes, célébrant le retour d’une liberté arrachée aux pisse-vinaigres de l’administration.
L’immobilité encore un peu forcée permet d’avancer certains petits travaux utiles..
…comme le piquage de la rouille sur la chaine principale, qu’il faudra probablement remplacer à court terme. Il est vrai qu’elle travaille dur, et souvent, lors nos croisières caribéennes.
Quittant le chaleureux mouillage de St Louis, par une météo idéale pour un tour de Marie Galante…..
….d’environ 40 milles, nous passons devant l’anse Canot et son îlot à langoustes…
…puis devant Capesterre….
….où l’avion, seul liaison autorisée entre les îles pendant le confinement, est en finale…
…enfin, après un empannage devant Grand Bourg nous bouclons le tour en repassant devant la distillerie Labat.
Le club nautique de Marie Galante organise aussi chaque dimanche une régate amicale et informelle ouverte à tous ceux qui le veulent, appelée « 10 heures pétantes ». Pas de règlement, pas de licence obligatoire, pas de jury, pas de handicap, pas de signature, un parcours simplissime et juste le plaisir d’être sur la ligne de départ et d’essayer d’aller plus vite que les autres. Une régate à l’ancienne entre amateurs plus ou moins équipés et sur tous types de bateaux.
Un vrai plaisir de virer l’ilet du vieux fort, puis la tonne de la pointe de folle anse avant de revenir au mouillage, devant les autres monocoques. Ils n’ont rien pu faire pour devancer Dartag très en forme. Seul un joli trimaran ultraléger nous a devancé. D’excellents souvenirs !
D’autres voiliers rencontrés en cette fin de saison, comme Iemanja 2, avec Pierre et Thérèse…
….ou François et Catherine sur Storia Storia, dont le blog vidéo est une merveille, sont des grands voyageurs que nous retrouverons sans doute dans le futur
Les Saintes sont toujours aussi belles…
…et la plus belle baie du monde offre ses couleurs de rêve…
…mais le village de Terre de Haut est quasiment désert. Quel contraste avec les années précédentes et sa fréquentation « tropézienne ». C’est bien agréable !
Et hop, encore un petit bouquin, allemand cette fois, pour découvrir le périple fantastique d’un troupeau de bovins qui raisonnent et agissent comme des humains pour échapper à leur folie et trouver leur terre promise. Désopilant et surprenant presque à chaque page !
La dernière escale, fut pour Sainte Anne dont le petit lagon est finalement moche et inconfortable.
Le désarmement de Dartag à Pointe à Pitre marque la fin de cet hiver tropical bien particulier commencé avec Nadine aux Grenadines, écourté par le covid19 et ses conséquences parfois horribles, prolongé par le confinement et l’arrêt presque total des transports aériens.
Il a fallu consacrer 7h 31 minutes pour chercher et finir par trouver, avec Air France en pleine pagaille, une vol de retour à la maison acceptable, mais avec trois semaines de retard sur le billet initial et l’obligation de louer une voiture à Marseille pour finir. A la guerre comme à la guerre aurait dit notre pauvre jeune Président, bien désarmé face à cette perturbation imprévue, révélatrice des faiblesses de notre pays, et malgré son autosatisfaction chronique ! Mais il y a pire !
Il faut maintenant remettre en route la maison de La Londe après un hiver bien perturbé. Que de surprises bonnes et moins bonnes ! Mais 2020 est une année à fruits et les abricots tombent de leur arbre à un rythme tel que j’ai épuisé mes pots de confiture vides en stock. A raison de deux ou trois kilos de fruits chaque jour les cadences sont infernales et la distribution va commencer !
L'été sera masqué, mais j'en ferai ma prochaine chronique, en attendant si possible de retrouver les Antilles l'hiver prochain.