Cette fois nous sortons des eaux fréquentées habituellement chaque année depuis des décennies. Cap sur l’Espagne du Sud, l’Andalousie, Gibraltar.

Mais d’abord il faut rejoindre la cĂ´te de la province de Murcie, si possible au-delĂ  du cap de la Nao, un des trois grands caps de la cĂ´te mĂ©diterranĂ©enne espagnole. Nous visons le cap Palos qui donne son nom Ă  une zone de MĂ©tĂ©o qui commence lĂ . Après les orages de la nuit de dimanche Ă  lundi accompagnĂ©s de pluies et vents d’ouest modĂ©rĂ©s au mouillage de Formentera, les trois sources que nous avions prĂ©disaient des vents d’est Ă  sud est force 3 Ă  4, sur l’essentiel du parcours. Quasiment l’idĂ©al !

Partis pour un après-midi tranquille et un petit coup de moteur bien utile quand la brise tombe au crĂ©puscule, mais toujours entourĂ©s de masses nuageuses menaçantes sans plus, nous pensions avoir une traversĂ©e tranquille. Quelle erreur ! Le vent est revenu rapidement de plus en plus fort obligeant Ă  des manĹ“uvres incessantes, jusqu’à la force 8 qui a durĂ© plusieurs heures. Nous Ă©tions entourĂ©s d’éclairs en permanence sur tout l’horizon, curieusement sans pluie et la mer est devenue très dĂ©sagrĂ©able.

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Au lever du jour, le vent s’est stabilisé à la force 5, mais avec une mer plutôt agitée, venant de l’arrière. Un grand groupe de dauphins (peut-être une trentaine) est venu jouer avec notre étrave pendant quelques minutes, mais aller les voir à l’avant après cette nuit agitée et avec les mouvements brusques du bateau dans la mer encore hachée eut été imprudent.

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Nous sommes arrivés à Carthagène (en espagnol Cartagena) juste après avoir passé le cap de Palos, en fin d’après-midi, avec une brise mourante. Et dans ce grand port, un seul mouillage possible, d’ailleurs vide, devant l’unique plage de cette ville. Soirée de repos avant une visite à terre reportée au lendemain.

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Cette grande et belle ville (400 000 habitants environ) partage avec sa voisine Almeria (200 000 habitants) une histoire multimillénaire remontant à l’antiquité phénicienne. Le mélange des cultures issues des envahisseurs successifs, dont les musulmans pendant cinq siècles, laisse de nombreux vestiges et musées que nous ne prendrons pas le temps de visiter cette fois.

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Aujourd’hui, Carthagène est une ville industrielle, portuaire et militaire. Son passé minier est encore bien visible par les balafres laissées dans ses collines autour de l’extraction du plomb. Elle fût la dernière conquise sur les républicains par le général Franco pendant la guerre civile et il en fit la plus importante base navale espagnole de méditerranée.

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Autour de sa citĂ© historique portant la cathĂ©drale construite après la Reconquista, les rues et places qui entourent le port sont magnifiques, les espaces piĂ©tonniers en marbres fort nombreux et les plantations de grande qualitĂ©. Les bâtiments officiels qu’ils soient civils ou militaire tĂ©moignent d’un souci de mise en valeur de la ville, mais celle-ci parait peu animĂ©e. Peu de monde dans les rues, pratiquement pas de circulation, deux ports de plaisances avec de nombreuses places libres,….serait-ce les consĂ©quences de la crise dont souffre le pays ?

Avec quelques approvisionnements frais, nous repartons en direction du Cap de Gata qui marque l’entrĂ©e dans la mer d’Alboran (qui a donnĂ© son nom Ă  une zone mĂ©tĂ©o Ă©ponyme). Alboran est un minuscule Ă®lot inhabitĂ© et pelĂ©, Ă  mis chemin entre les cĂ´tes marocaines et espagnoles aujourd’hui rĂ©serve intĂ©grale et oĂą le dĂ©barquement est interdit. Dommage, j’y aurais bien fait un tour !

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Le vent n’a pas cessé de se renforcer toute la journée et cette étape très rapide s’est terminée en pleine nuit dans un fort vent portant. Juste après ce grand cap, un mouillage très venté mais assez abrité de la forte houle, était déjà fréquenté par un autre voilier et un bateau de pêche, heureusement munis de feu parce que dans la nuit noire…….

Bref, dans la panique de l’arrivĂ©e, j’ai posĂ© mon beau Samsung dans un fond de verre de pastis très diluĂ© que j’avais oubliĂ©. Quand je l’ai repris, dix minutes plus tard sans doute, il Ă©tait complètement ivre, n’obĂ©issant plus Ă  mes touchers dĂ©licats sur l’écran, et m’imposant certaines applications dont je n’avais rien Ă  foutre. Scrogneugneu,… j’ai cru qu’il Ă©tait mort (enfin ivre-mort). Je l’ai soigneusement ouvert et sĂ©chĂ© avec un PQ, lui ai soufflĂ© un peu dans les bronches pour le dĂ©griser et il a redonnĂ© quelques signes de vie. Le lendemain tout marchait Ă  peu près, mais la prise USB par laquelle on le recharge doit avoir pris un bon coup, car il ne veut plus se recharger et la connexion au PC est en rideau. J’espère que je vais trouver une solution, car cet appareil me sert Ă©normĂ©ment, pour la navigation, pour l’accès Internet, pour mes rĂ©pertoires. Pour le tĂ©lĂ©phone j’ai un appareil de secours, mais c’est vraiment balaud !

En ce jeudi matin 29, le vent Ă©tait encore plus fort et toujours dans la bonne direction. Sous voilure rĂ©duite, nous avons longĂ© la Costa Del Sol Ă  une vitesse phĂ©nomĂ©nale passant souvent les 10 nĹ“uds et enregistrant plusieurs pointes Ă  plus de 11, avec un record Ă  11,9 nĹ“uds. Impressionnant, surtout quand il a fallu manĹ“uvrer dans une houle de trois mètres pour Ă©viter au dernier moment un bateau de pĂŞche dont la route Ă©tait imprĂ©visible, le bougre !

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A un moment, la turbine de l’hydro générateur faisait de telles cabrioles qu’elle s’est emmêlée dans sa ligne. J’ai dû la remonter pour la démêler et j’en ai profité pour lui mettre les petites pales qui n’avaient encore jamais été essayées. Peine perdue, son comportement était tout aussi turbulent, mais elle produisait un peu moins, par contre elle ne s’est pas emmêlée à nouveau.

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Passant en revue toute la cĂ´te de l’Andalousie, nous avons dĂ©couvert les traces du dĂ©veloppement effrĂ©nĂ© de cette rĂ©gion qui alimente en fruits et lĂ©gumes toute l’Europe, mais Ă  quel prix ! Des cultures sous serres dĂ©veloppĂ©es Ă  l’infini, avec des usines de dessalement d’eau de mer sur la cĂ´te pour faire face Ă  la pollution des nappes phrĂ©atiques.

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Quant à l’urbanisme délirant, fortement lié au tourisme, c’est à se taper la tête contre les murs, même s’il subsiste par endroits des ilots de constructions de style arabo mauresque plus traditionnels.

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Enfin, l’arrivĂ©e sur le « Rocher Â» après 160 milles conclus par quelques heures de moteur, sans vent, mais avec toujours une houle venant des cĂ´tes tunisiennes et algĂ©riennes balayĂ©es par un fort vent d’est qui devrait arriver ici aussi bientĂ´t. Vu de l’est, il n’a pas changĂ© depuis mon dernier passage en 1961, comme pilotin sur un remorqueur de la compagnie des Abeilles qui sortait de rĂ©vision Ă  Marseille et regagnait son port d’attache Ă  Cherbourg. Curieusement je me souviens d’un ballet de dauphins et de poissons volants Ă  cet endroit, le mĂŞme que je viens de voir. Cela aussi devait dĂ©jĂ  exister du temps des galères romaines.

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L’occasion d’une escale un peu plus longue, de panser les petits bobos de Dartag et de refaire les pleins, avant de se lancer sur l’Atlantique la semaine prochaine.