Cette deuxième journée à Egine (vendredi 27) était encore plus belle que la précédente: beau temps calme et chaud, très chaud. Mais, avec nos petits scooters, c'était vraiment idéal et nous avons fait une grande virée passant par les classiques de cette ile, sanctuaire et colonne d'Apollon, temple d'Afaïa (cette fois le musée était ouvert), immense église de Kontos (Moni Agio Nektariou, toujours en travaux). L'innovation a consisté à parcourir toute la côte est, escarpée et émaillée de criques et petits ports vraiment mignons et colorés, puis à entreprendre l'ascension du mont Zeus, point culminant de l'ile, à la recherche d'un site archéologique signalé mais finalement introuvable, tant les roches sont fracturées et se distinguent mal des restes des constructions écroulées par les séismes.

panoram d'Egine



Mais cette ascension a été pour Julie l'occasion de prouver son brio en tout terrain caillouteux, et d'emmener Béatrice, très détendue, à l'un des plus beaux points de vue de l'ile, d'où le golfe de Saronique est visible à 360 degrés avec des couleurs et des paysages à couper le souffle. Alain et Marie étaient un peu moins frais en arrivant au sommet, mais il est vrai que leur scooter était beaucoup plus fatigué et poussif.



A la descente, dans les plantations de pistaches, nous avons pu voir de près le travail de la récolte, du tri, du lavage et de l'emballage de ces merveilleux fruits par une petite équipe sous la direction d'un jeune anglais hyper décontracté qui profitait de quelques jours de vacances pour venir récolter les pistaches de ses terres grecques, avant de regagner sa résidence habituelle de Dubaï (ces anglais tout de même !). Il nous a montré dans le détail les différentes phases du travail, mais à la question de savoir combien de temps durait l'opération de grillage, il a répondu avec une naïveté déconcertante, que seule sa femme savait le faire, et que c'était uniquement une question de "feeling": bref un secret bien gardé ! Mais nous avons eu droit en cadeau, à environ un kilo de pistaches fraiches à manger dans les trois jours car elles ne se conservent, en l'état, pas plus longtemps. C'est tellement bon, qu'en deux jours nous n'en avions plus.

lavage et tri des pistaches



Après avoir rendu les scooters, nous avons appareillé pour Korfos avec l'idée d'y louer une voiture pour visiter les magnifiques sites d'Epidaure, Nauplie Mycènes et Corinthe le lendemain. Le débarquement directement sur le quai de la taverna Giannis fut encore l'occasion d'une merveilleuse soirée, mais les ressources de ce petit village charmant ne vont pas jusqu'à permettre de louer un véhicule, quel qu'il soit. Plutôt que d'en faire venir un de Corinthe, nous avons préféré rejoindre dès le lendemain Athènes en modifiant notre programme en conséquence.

bain aux Dhiaporoi



Comme le vent tardait à se lever ce samedi matin, nous l'avons attendu en nous baignant et en déjeunant au mouillage dans l'archipel des iles Dhiaporoi, non loin de Korfos. Dès notre deuxième départ, Eole nous a gratifié d'une belle brise de sud dont nous avons profité tout l'après-midi, jusqu'à notre arrivée à proximité d'Athènes, slalomant parmi les pétroliers, vraquiers et autres minéraliers au mouillage autour du Pirée, les ferries du trafic avec les iles ou autres navires de croisière. Mais le plus dur a été de trouver un point de chute permettant d'envisager de visiter Athènes. Les deux premières marinas nous ont éconduits plus ou moins poliment en disant qu'il n'y avait aucune place pour les yachts de passage et dans la troisième, Kalamati , nous avons "squatté" une place libre sans rien demander, en espérant pouvoir y rester, car la nuit était pratiquement tombée.

slalom entre les gros



Bien sûr, le dimanche matin, il nous a été signifié poliment mais fermement de libérer rapidement cette place, car un grand catamaran (vraiment pas marrant) devait rentrer d'une sortie vers midi et récupérer sa place. Sachant que les compagnies de location de voiliers à la semaine, échangent les équipages pendant les week-end, nous avons contacté la plus proche, pour savoir si un de ses emplacement pourrait se libérer. Miracle ce fut oui, mais il fallait attendre midi et de toute façon notre présence ne pourrait pas excéder le jeudi soir. Merci quand même, les filles allaient pouvoir profiter le cette escale athénienne sans problème, mais il allait falloir trouver une autre solution pour partir au Havre le week-end suivant, et cela s'annonçait plutôt difficile, les différentes autres marinas du secteur nous ayant déjà éconduits ou répondu par téléphone qu'elle n'avaient aucune possibilité d'accueil.



Donc, ce dimanche matin, les filles ont pris seules le tram et le métro (une heure de trajet) pour visiter Athènes en espérant que nous pourrions les rejoindre plus tard. Finalement nous avons pu partir vers 13h30 et notre programme a suivi le leur, mais le décalage était tel qu'il valait mieux ne pas chercher à les rattraper à tout prix, au risque de bâcler exagérément certaines visites.

Odéon d'Hérode Atticus



L'acropole est un lieu vraiment magique. Bien que presque tous les monuments, dont le Parthénon, soient en travaux de restauration massive, l'impression de beauté et d'harmonie est immense. Ce marbre blanc, ces dimensions et ces perspectives, les statues des divinités ou des hommes et femmes qui ont marqué l'antiquité, la vision que l'on a de toute l'agglomération et bien sûr des différents sites grecs et romains à proximité, confirment s'il en était besoin, la richesse de ces civilisations, la sagesse de leurs penseurs, la créativité des ingénieurs et architectes. Non, nous avions le sentiment que notre actuelle civilisation occidentale n'a rien inventé, en dépit de ce qu'elle croit, à l'exception bien sûr de certaines technologies dont on arrive finalement à se demander si elles sont un réel progrès pour les humains.

Caryatides



Quant au tout récent musée de l'Acropole, ouvert en juin 2009, c'est un grand et beau bâtiment moderne, montrant sur deux niveaux l'essentiel des objets importants découverts depuis un ou deux siècles sur le site, y compris cinq des fameuses caryatides dont le sixième exemplaire original est à Londres. La pièce qu'Alain a considéré comme la plus émouvante est une tête de guerrier en bronze, grandeur nature, dans un état de conservation extraordinaire et dont la finesse des traits, des oreilles, des cheveux sont littéralement admirables. Pour Marie, la délicatesse des sculptures qui donne l'illusion de la transparence des vêtements sur le corps de femmes est merveilleuse. Le troisième niveau est surtout consacré aux animations multimédias et à l'intendance, et le niveau supérieur reproduit les dimensions du Parthénon avec le même nombre de colonnes, en tube d'acier inoxydable, portant les restes des frises supérieures de l'édifice, restaurées et réassemblées dans leur position d'origine. C'est magnifique, et la conception générale de ce musée est très séduisante, car, malgré la foule qui s'y pressait, il était possible de s'attarder facilement sur les pièces de son choix. Par contre, toute photo est interdite, et une armée de vigiles veille au grain, l'œil menaçant. Malheureusement, ce musée tout neuf n'est pas encore équipé des plaquettes, brochures et ouvrages en français dont nous aurons bien acheté quelque spécimen.

Musée de l'Acropole



Les filles de leur côté, ont profité de leur avance pour faire un "tour sight-seeing" en bus découvert dans la ville, puis du lèche vitrine et profiter des soldes en arpentant tout le quartier du Plaka et de Monastiraki, célèbres pour leurs magasins de tout. Nous nous sommes retrouvés à bord de Dartag vers 20h, fourbus, collants, mais gâtés par tant de belles choses.



intérieur d'un café athénien



Après une telle journée et un délicieux diner grec tardif, la soirée à bord fut consacrée à trier et profiter des photos faites pendant la journée (environ 250, un travail très plaisant), et poursuivie par quelques parties acharnées de "trouduc": jeu de cartes très subtil provoquant des fou-rires impressionnants chez les participants dès lors qu'ils ont commencé à déguster la "citronette" glacée, sélectionnée parmi les produits hallucinogènes du bord. Une mer, que dis-je, un océan de rigolades, qui s'est poursuivie jusqu'à une heure avancée de la nuit. Quelle vitalité !



Et le lendemain rebelote dès l'aube. Une longue prospection téléphonique des loueurs de voiture, couronnée de succès, a permis à Alain d'aller chercher au centre ville, la Fiat Punto Grande de nos rêves, pour visiter le nord du Péloponnèse après avoir traversé le canal de Corinthe. Mais ce n'est pas la porte à côté car ce parcours de ralliement représente environ 150 km.

belle d'Epidaure

Mais quelle récompense d'arriver à Epidaure et de sauter dans la ville antique d'Esculape (ou Asclépios, dieu de la médecine) remontant au 6 ème siècle avant JC. Les médecins "modernes", à partir d' Hippocrate, se réclament de lui. Le théâtre est quasiment intact et son acoustique légendaire est parfaitement vérifiée par les quelques touristes présents en même temps que nous, qui poussent leurs cris primaux depuis le centre de la scène pour écouter leur propre voix. Tordant ! L'ensemble, immense, des ruines des bâtiments de soins, des thermes, logements, hôtels et temples dédiés à tous les dieux de l'époque, fait l'objet de restaurations lourdes, étalées sur des dizaines d'années, et le petit musée rassemble des copies des principaux objets, ex-votos, statues, frises, etc,.. trouvés sur place, dont l'essentiel est conservé au musée national d'Athènes.

Nauplie



Un orage menaçant depuis un moment a fini par nous chasser de ce merveilleux site et nous avons repris la route pour Nauplie dans le fond du golfe d'Argolide. Cette grande cité possède aussi des vestiges intéressants, dont deux sites importants: Acronauplie, forteresse antique puis franque puis vénitienne aux portes ornées du lion de St Marc, et le Fort Palamède dominant la ville depuis la seconde occupation vénitienne à partir 1686. Le port est également intéressant avec son ilot Bourdzi, fortifié lors de la première occupation vénitienne à partir de 1471. A ce moment de notre circuit, la pluie était forte (la première depuis le mois de juin) et l'après-midi déjà bien avancée, si bien que nous avons renoncé aux visites à pied pour nous lancer à travers la plaine agricole et fruitière qui conduit à Mycènes.

Porte des lionnes



L'enceinte de ce joyau de la civilisation mycénienne aurait été construite par Persée, fils de Zeus et Danaé, avec l'aide des cyclopes. Elle fut le siège de la tragédie des Atrides, racontée par Homère dans l'Iliade, puis par Eschyle, Sophocle et Euripide, et est une source inépuisable d'inspiration pour les auteurs de théâtre et d'art lyrique jusqu'au 19 ème siècle après JC, mêlant Ménélas, Hélène, Pâris, Agamemnon, Clytemnestre, Iphigénie, Cassandre, Oreste, etc...tous ces noms évoquant dans nos esprits bien des souvenirs et des émotions. La cité remonte au 15 ème siècle avant JC. Il s'agit du plus ancien ensemble de tous les sites que nous avons visités en Grèce jusqu'à ce jour, si l'on excepte les vestiges de la civilisation Minoenne de Santorin. C'est Heinrich Schliemann qui l'a découvert à partir de 1874 alors qu'il cherchait le trésor de Priam, après avoir déjà découvert l'emplacement de Troie en Asie mineure. Malheureusement notre visite fut écourtée par la proximité de la nuit, mais nous avons quand même pu admirer la colossale "porte des lionnes" donnant accès à l'Acropole. Les filles profitaient d'un intermède pour réussir une séance de photos mémorables avec l'aide de deux touristes belges qui les ont saisies au vol dans un impressionnant décor de montagne au crépuscule.



A notre retour à bord, ayant finalement zappé Corinthe, il y a bien longtemps que la nuit était tombée et la crainte que nous avions de voir Dartag inondé, car nous avions laissé tous les hublots ouverts, était vaine. Il n'avait pas plu sur notre marina, bénie des dieux. Un diner bien mérité, suivi d'une longue séance de photo particulièrement jouissive compte tenu des facéties, et de la créativité des filles, nous permis d'aborder sereinement la troisième partie de la soirée consacrée au "trouduc" déjà cité. Cette fois Alain tenait à être initié et il le fit avec un certain bonheur, parvenant même à obtenir une fois le titre envié de "président". Mais la fatigue aidant, il s'éclipsa assez rapidement (vers 3h du matin) avant le début de la partie de "citronette" entretenant la flamme des fou-rires jusqu'à 5h du matin.



Cette dernière nuit à bord fut très courte, car, ce mercredi à l'aube, il fallait reprendre le chemin de l'aéroport. Ce fut très juste pour Julie, en raison de travaux dans le métro d'Athènes, plus relax pour Béatrice qui a pu rédiger et expédier ses dernières cartes postales avant de prendre congé de nous.