Malgré une météo encourageante, le vent était encore très fort lundi matin et avait hurlé toute la nuit dans les mâts de bateaux amarrés comme nous dans le port de Mikonos. Nous avons cependant décidé de faire confiance au bulletin des prévisionnistes grecs et somme partis avec un petit mouchoir de génois, bien décidé à continuer notre périple vers le sud des cyclades.

brise

Le passage entre Mikonos et Delos devait concentrer les efforts d'Eole pour nous décourager, car le meltem soufflait à 30-35 noeuds avec des pointes à 40. Mais nous avons tenu, malgré quelques rafales encore plus rageuses au débouché du détroit, alors que nous naviguions à plus de huit noeuds sur le mer bien blanchie par l'écume. Une heure après, c'était beaucoup plus raisonnable et nous avons déroulé toute la toile pour finalement arriver à Naxos en milieu d'après-midi.

Depuis, nous profitons de nuits calmes et de journée de faibles brises. Même le Meltem diurne nous a oubliés. Cela nous oblige, si nous voulons continuer nos visites, à utiliser la risée Volvo, mais n'est-elle pas là aussi pour cela ?

Naxos

L'ile de Naxos est la plus grande des Cyclades mais ne possède qu'un port et peu d'abris. La ville principale est active et attrayante avec son architecture de cubes blancs et bleus.

Palais Vénitien

Mais la citadelle vénitienne qu'on apelle ici le Kastro est bien intéressante, car elle contient un cathédrale catholique du 13ème siècle et de nombreux petits palais vénitiens, dont beaucoup ont été restaurés par leurs propriétaires, et mettent en valeur les blasons des familles nobles qui les avait construits au 14ème et 15ème siècles, avant la conquête par le pirate turc Barberousse en 1566.

temple dapollon

Plus étonnant encore est l'arche du temple d'Apollon dont on voit les fondations sur l'ilot de Palatia juste à la sortie du port. Ce temple, entrepris au 6ème siècle avant JC, ne fut jamais terminé. C'est un lieu de ralliement des iliens et des touristes qui viennent en masse y voir le coucher de soleil. Celui que nous avons vu était sensationnel, et immédiatement suivi par le lever de lune, quasiment pleine. Vraiment délicieux dans le calme de cette soirée.

L'ile suivante est Paros, célèbre pour son marbre, le meilleur du monde, plus blanc, plus lumineux et même plus transparent que celui de Carare (jusqu'à 3,5 cm d'épaisseur il laisse passer la lumière !) mais plus fragile. Cette ile-ci regorge de criques et mouillages abrités, et son port est très accueillant.

Petite chapelle

Nous avons commencé par la baie de Naoussa au nord. Un grand plan d'eau possédant plusieurs ilots, dont un portant une petite chapelle blanche. Nous n'avons pas résisté au plaisir de mouiller à proximité et d'y déguster le calme et les couleurs du paysage. Cet endroit idyllique, en ce mardi de début août était à peine fréquenté par quatre ou cinq yachts, espacés de plusieurs centaines de mètres. Incroyable ! Et il y a de nombreuses autres possibilités d'isolement dans ce grand espace, autour du village blanc devenu parait-il un des endroits branché des Cyclades. Il doit aussi y avoir suffisamment d'eau à Paros pour entretenir des plantations et parc d'agréments comme ceux que nous avons vus sur les collines arides proches. Mais cela surprend quand même un peu de voir ces oasis de verdures.

Ce mardi soir, nous avons repris la mer pour arriver jusqu'au port de Paros, appelé Paroikia. L'endroit est parfaitement abrité et nous avons mouillé au fond de la baie, devant les nombreuses tavernas qui bordent la plage. Evidemment, après quelques repérages, nous avons cédé à la tentation de diner dans l'une d'entre elles. En plus de la gastronomie locale, toujours aussi séduisante et visible avant de se mettre à table dans une sorte de vitrine destinée à tenter encore davantage les futurs clients, nous avons eu affaire à un personnel d'une très grande qualité, aimable comme toujours, très professionnel et parlant en plus un français tout à fait acceptable.

petit synthronon

La visite de la ville, ce mardi matin nous a permis de voir, après les sépultures antiques tout récemment découvertes à deux pas du port, la fabuleuse cathédrale orthodoxe de la Panagia Ekatontapyliana. Sa fondation remonte au 4ème siècle, à l'initiative de Sainte Hélène, mère de Constantin le Grand, premier empereur romain chrétien. Détruite partiellement de nombreuses fois par des envahisseurs ou des tremblements de terre, elle a été restaurée au 17ème siècle avec le souci de respecter tous les apports chrétiens successifs. Aujourd'hui c'est un ensemble magnifique de nefs et chapelles dédiées à différents personnages de l'histoire de la chrétienté grecque, enrichi d'un cloître à trois côtés et dans laquelles sont apparents les vestiges des constructions antérieures à la chrétienté qui ont été retrouvés sur place.

fonds baptismaux

Cette visite approfondie, guidée par le manuel en français que nous avons trouvé dans la boutique, nous a pris plus d'une heure et demie, et causé une émotion assez profonde devant une telle beauté et une telle spiritualité vivante. Les visiteurs sont libres et se croisent dans l'église avec les popes et les fidèles ou les paroissiens, souvent très jeunes, qui viennent se recueillir, qui devant une icône, qui devant une statue, qui devant un objet sacré, se signant et priant avec une ferveur que nous n'avons pas l'habitude de voir dans nos pays de l'ouest de l'Europe. Très émouvant.

La suite du programme devait nous faire retrouver la sauvagerie des mouillages déserts dans des criques de rêve, et nous rapprocher de cette vie de robinsons qui contribue à un bon équilibre avec celle de pélerins des origines de notre culture.

L'ile voisine d'Andiparos (encore un "os") n'est séparée de Paros que par un étroit chenal baré par un îlot occupé par un hotel de luxe. On peut passer d'un côté ou de l'autre, mais c'est très juste, la profondeur étant inférieure à trois mètres. Nous avons choisi le passage ouest, au moteur, tout doucement et,......(suspense insuportable !) nous n'avons rien touché, mais avons bien vu les fonds dans cette eau cristalline ! Puis nous avons mouillé dans une toute petite baie, avec un autre bateau juste en dessous d'une petite chapelle blanche. Mais celle là était adossée à une superbe maison probablement neuve, construite discrètement en pierre locale avec le souci de ne pas dominer la chapelle, mais au contraire de la mettre en valeur. Etonnant et superbe !

petite chapelle

Ce jeudi matin après une nuit de pleine lune, en attendant que le vent se lève, il nous fallait prendre une décision importante: quelle serait notre prochaine destination ? Et ce fût Ios (encore un "os") à une quinzaine de milles au sud, sur la route de Santorin où nous n'envisagions d'aller qu'en prenant le ferry, si le vent n'était pas eu rendez-vous. Et bien si, après quelques bégaiements, il se décida finalement à se lever du nord ouest si bien que nous brûlâmes l'escale de Ios et poursuivîmes notre route vers la caldeira peut-être la plus célèbre du monde.

Enfin une ile sans "os". Et pourtant elle exerce déjà sa facination sur nous. En arrivant, ce jeudi soir, le calme du large a fait place à l'agitation frénétique d'un lieu surfréquenté, en particulier par les paquebots de croisière au nombre de quatre qui déversaient leur torrents de passagers à terre en utilisant toutes les navettes locales disponibles. Le port de Thira, où nous étions amarrés après avoir fait le tour de la moitié nord de la caldeira et admiré la variété et la beauté de ces falaises bouleversées et surmontées de villages blancs, résonnait de leurs moteurs surpuissants, et était agité comme s'il y avait eu une tempête. L'immense escalier et le téléphérique qui permettent de rejoindre la ville haute fourmillaient littéralement de petites silhouettes. Comme le port est extrêment profond et garni de blocs de rochers amoncelés par les secousses telluriques, nous avions noué sur notre ancre un long petit filin destiné à pouvoir la remonter si elle se coinçait, plutôt que de devoir l'abandonner en partant. Figurez-vous que l'une des premières navettes qui est passée à proximité de notre avant, l'a purement et simplement sectionné.

Port de Thira

Impossible de débarquer et d'abandonner le bateau dans ces conditions, et nous avons profité du spectacle et d'un soleil couchant exceptionnel sur les vestiges ouest du cratère à demi englouti. Nous espérions qu'après le départ des croisiéristes l'ambiance se calmerait et la nuit serait reposante. Quelle erreur

deux ou trois heures après l'arrêt de la noria des navettes, un vent de nord

s'est levé, agitant le plan d'eau et rendant le confort à bord extrêmement précaire. Après différentes manoeuvres, nous avons pu réduire un peu les bruits de chaine et d'amarres et aussi l'impact des retours de vagues à l'arrière de Dartag pour une deuxième partie de nuit moins stressante.

Sans effort, vers 6h30 nous étions debout, et avons profité du lever du jour pour nous échapper de cet enfer (l'ancre n'était pas coincée, ouf), et rejoindre le sud de l'ile, achevant ainsi notre visite de la caldeira. Ce vendredi, nous sommes donc amarrés confortablement dans la marina de Vlikadha au sud de l'ile, d'où nous allons partir faire une visite terrestre plus complète avec, devinez quoi ? un scooter.