Et bien cela reste une question: aimons-nous le Meltem ? Ce vent du nord qui souffle souvent très fort en mer Egée, pendant l'été. Pour le moment nous ne l'avons pas encore vraiment pratiqué, mais en avons eu juste un avant goût avant hier vendredi 24, et surtout aujourd'hui dimanche.

En quittant Korfos, nous avons entendu un bruit bizarre, une sorte de "clac" à l'arrière, en passant en marche avant après avoir relevé l'ancre. N'y prêtant pas trop attention, nous avons envoyé la voile dès la sortie de ce délicieux mouillage, nous dirigeant vers Poros juste à la sortie du golfe de Saronique. La brise d'abord faible s'est progressivement renforcée au cours de la journée. Du coup, l'arrêt pour déjeuner que nous avions envisagé à l'extrémité sud de l'ile d'Angistri n'avait plus d'intérêt, car nous n'avions pas besoin d'attendre le vent. En plus, la crique que nous visions était pleine, donc pas de regret.

Poros le matin

L'arrivée à Poros est magnifique. On passe dans une sorte de goulet et on tourne aussitôt à gauche en découvrant cette ville médiévale construite dans un ilot si proche de la côte que ses faubourgs se sont developpés sur le continent tout proche. Un grand plan d'eau est disponible avant la zone militaire interdite (mais l'est-elle vraiment ?) et permet, en quelques minutes d'annexe, de rejoindre cette cité délicieuse et animée. Nous y avons diné dans une taverna sur le quai aéré par les restes de la bonne brise de la journée. En flanant au milieu des commerces, sur le chemin du retour, Marie nous a offert un assortiment de patisseries locales, très imprégnées de miel, et elles font encore aujourd'hui nos gâteries presque quotidiennes.

Poros le matin

Une petite plongée d'inspection a permis de découvrir un bout de pêcheur en polypropylène enroulé autour de l'hélice. C'est le deuxième cette année après celui de Bizerte, mais celui-ci était si serré qu'il n'a pas été possible de le retirer entièrement. Heureusement il n'a provoqué aucun dégât, et en coupant tout ce qui dépassait, le fonctionnement était tout à fait normal.

Le petit chenal qui sépare Poros du Péloponèse est si étroit et peu profond par endroit, d'après la carte, qu'il ne nous paraissait pas raisonnable de l'emprunter. Mais après avoir vu plusieurs voiliers y passer, et même, pendant notre diner, un hydroglisseur, nous avons compris qu'il n'y avait aucun problème. Et c'est par là que nous avons pris le chemin de notre première Cyclade, sans savoir si ce serait Kéa ou Kithnos, car il faut laisser aux dieux leur rôle.

Kea première Eolienne

Ainsi, la traversée du golfe de Saronique nous fût aisée, malgré les vents assez instables au début, la mer par moment un peu dure, et nous atteignâmes une crique bien abritée de Kéa sous voilure réduite avec un petit Meltem de 20 à 25 noeuds. Nous n'étions que le septième voilier à nous y installer pour la nuit, alors qu'Athènes est si proche, le temps si beau et qu'il s'agissait du dernier week-end de juillet. Où sont donc les foules annoncées par les guides ? Naturellement l'eau est nettement plus froide, 27,2° seulement, mais tellement claire, qu'avec un masque on voit au moins à trente cinq mètres.

Enigme des carcasses

La encore, comme en de nombreuses occasions avant, nous avons pu voir un grand nombre de structures en béton armé, ébauches de constructions apparemment abandonnées en l'état. C'est une énigme que nous vous soumettons. On parle de traditions familiales bouleversées par le mode de vie moderne, de scories d'un système fiscal désuet,...Mais en tout cas c'est surprenant et laid, et on ne s'y habitue pas, surtout quand elles sont aussi nombreuses dans un site aussi beau.

Ancre par 8 m de fond

Dartag seul à Siros

Sur la route de Mikonos, qui pour certains est un mythe, se trouve une autre ile, moins connue, appelée SIROS, et bigrement intéressante. C'est la plus peuplée des cyclades, et leur capitale administrative. Mais elle fut aussi un haut lieu de catholicisme romain, particulièrement soutenu par la France qui y a protégé de nombreuses congrégations religieuses après la conquête turque en 1537, en vertu d'un accord avec le sultan de l'époque. Il y a ainsi deux cathédrales à Ermoupolis (et peut-être trois avec celle d'Ano Syros), la capitale de l'ile, dont le nom est tiré de celui du dieu du commerce Hermès. Elle accueillit également un nombre important de réfugiés venant de Turquie et des autres iles restées turques après l'indépendance de la Grèce en 1822. Elle fut un port très important, siège d'industries prospères (chantiers navals, textiles, tanneries) et il fut question un moment d'en faire la capitale de la Grèce. Cette prospérité et cette notoriété ont laissé à Ermoupolis de splendides bâtiment publics et privés et une tradition intellectuelle et culturelle significative, traduite en théâtres, opéras, concerts, festivals encore bien vivants.

Ermoupolis les deux cathédrales

C'est là que nous sommes arrivés ce dimanche midi, en réduisant progressivement la toile au fur et à mesure de la montée rapide de la force du vent, après une escale de rêve au nord de cette même île, où nous avions un immense mouillage parfaitement calme pour nous tous seuls (avec un autre voilier à 500 mètres). Nous sommes maintenant à l'abri, le temps qu'un coup de vrai Meltem, prévu par la météo grecque jusqu'à lundi soir, passe. Nous en profiterons pour visiter cette ile.

Mais nous irons à Mikonos, et sûrement à Delos aussi, le moment venu, éventuellement en prenant le ferry, si Eole nous empêche d'y aller à la voile par nos propres moyens dans les jours qui viennent.