la douceur de l'escale à Trizonia, nous a conduit à la prolonger un peu. Nous y avons retrouvé nos amis Thierry et Nicole, qui repartaient pour Annecy lundi 13, après avoir désarmé leur bateau sur place. Il reviendront fin août pour un deuxième périple grec après quelques festivités familiales, dont la naissance d'un petit enfant. Nous avons dégusté avec eux des spécialités locales, dans cette ile minuscule, en nous installant à la terrasse d'une Taverna au bord d'une petite anse à deux pas de la marina. Une délicieuse soirée.

Trizonia



Lundi matin, comme prévu par la météo, le vent était calmé, tellement d'ailleurs qu'il a fallu attendre que se lève une petite brise de demoiselle pour appareiller. Ce paresseux louvoyage dans un golfe de Corinthe, complètement apaisé, nous a mené jusqu'à Galaxidi une vingtaine de milles à l'est, longeant une route comportant des ouvrages d'art impressionnants. Devant l'empressement qu'a mis le maître de port à nous accueillir et à nous montrer la place que nous pouvions occuper, notre tentation de rester dans la baie au mouillage s'est transformée en manœuvre d'accostage parfaitement réussie. Mais le quai était tellement haut, qu'il nous fallait grimper dans le portique pour débarquer. Ainsi, nous nous transformâmes en agiles "grimpeurs sur tubes inox" pour nos escapades terrestres.

Black Rose



Alors que nous venions de quitter le bateau pour aller diner sur une terrasse toute proche, un énorme motor-yacht d'au moins quarante mètres s'est présenté pour accoster et nous étions juste au bout du quai qu'il visait pour lui tout seul. Il a demandé au maitre port de nous faire déguerpir. Sans succès, ce dernier prétendant qu'il ne pouvait pas joindre les propriétaires qui n'étaient pas à bord et suggérant poliment au capitaine de ce vaisseau de se présenter en marche arrière de façon que son étrave élancée ne vienne pas surplomber notre cockpit. Ce qu'il a fait. Ainsi, notre flanc gauche était à un mètre de sa plage arrière et nous redoutions un peu de passer la nuit avec le ronflement de ses différents moteurs auxiliaires, groupes électrogènes, pompes et systèmes de sécurité divers et variés, sans compter les effluents divers et fumées noires qui peuvent s'échapper des nombreux orifices de cette immense coque dont le pont supérieur était au niveau du deuxième étage de nos barres de flèche (environ 13 mètres d'altitude).



A notre retour du restaurant, un peu inquiets, nous avons constaté qu'en dehors d'un discret ronronnement, les nuisances étaient quasi nulles, ouf. Mais notre sommeil n'a peut-être pas été aussi réparateur que nous l'aurions souhaité. D'autant plus que ce géant est parti à 6h précises, mais plutôt discrètement, ne brassant l'eau du port avec ses puissantes hélices qu'à bon escient, et le plus modérément possible, sans doute. Bravo à son captain, mais il nous a réveillés quand même. Juste pour rire, cette unité de luxe, illuminée la nuit comme un jukebox ou un billard électrique des années soixante, et diffusant à un kilomètre à la ronde son point d'accès Wifi créé à son nom, mais protégé, s'appelle BLACK ROSE, port d'attache Kingston.

Galaxidi



Après quelques courses locales dans ce petit port situé dans un joli site mais sans beaucoup de caractère, nous avons décidé de nous rapprocher de Delphes pour minimiser les trajets en bus, pas forcément très agréables avec la chaleur ambiante. Nous avons donc slalomé à la voile entre les îles du golfe jusqu' Itéa, ville discrète vivant de ses mines de fer, 3 milles plus au nord, et nous sommes amarrés dans la marina un peu vieillotte et dont les équipements sont plus ou moins entretenus, comme souvent jusqu'à maintenant. En principe elles sont gratuites dans ces conditions. Nous étions installés devant un Dufour 35 vieux de trente ans armé par un couple de québécois avec qui nous avons lié conversation au moment où la camionnette de livraison de carburant est passé sur le quai en klaxonnant pour proposer ses services. C'était une opportunité (finalement assez compliquée dans sa partie règlement) de faire le plein, mais nous avons profité de cette livraison "à domicile" pratique et inconnue chez nous. Les québécois (lui a vraiment un look à la Moitessier) termineront en 2010 un tour du monde de 10 ans, par le pacifique, l'indien, la mer rouge, la méditerranée, en enfin l'atlantique nord jusqu'à Montréal. Quel beau périple, avec des arrêts de plusieurs mois, voire plusieurs années dans les endroits qui leur plaisaient, et en retournant au Québec plusieurs mois par an ! Ils sont repartis tôt ce mercredi matin car ils veulent encore voir la mer Adriatique en entier, avant d'hiverner une dernière fois, à Port Saint Louis du Rhône, l'hiver prochain.



Retournant à bord, après une petite visite en ville avant le diner, nous nous sommes fait bêtement harponnés par un militaire en uniforme blanc, qui nous a demandé le nom de notre bateau (comme si nous avions des têtes de plaisanciers sur nos petits vélos pliants !). Et nous a convoqués au bureau des gardes côtes avec un autre couple de français en croisière sur leur Sharki et que nous suivions depuis quelques jours. Bref nous avions mis le doigt dans un engrenage administratif qui nous a paru un temps un peu décourageant, car ce militaire ne parlait que très mal l'anglais et nous pas du tout le grec. Il nous demandait très laborieusement d'aller aussi le lendemain matin au bureau "EFORIA" (complètement inconnu de nous) à 35 minutes de bus pour remplir et payer un formulaire d'entrée dans les eaux grecques. Finalement il nous a fait payer un taxe portuaire modeste, et nous a proposé de nous conduire lui-même le lendemain matin à ce bureau. Ce mercredi matin lorsque nous nous sommes présentés, il n'était pas là et ses collègues n'étaient pas au courant. Après quelques palabres et vociférations incompréhensibles d'un gradé, puis la prise en main de notre dossier par une jeune femme en tenue de combat, grande, brune, souriante, absolument magnifique, et parlant très correctement l'anglais, nous avons été relâchés, avec la recommandation de faire la démarche demandée à l'occasion de notre prochaine escale dans un grand port. Ouf ! Mais cette affaire de "transit log" pour les voiliers, spécificité grecque causant un problème de niveau européen, et qui, selon nos informations toutes récentes, aurait été supprimé au 1er juillet 2009, n'est pas encore bien claire. A suivre........mais nous avons perdu une journée, et avons du remettre notre visite de Delphes à jeudi.



Du coup, nous avons lié conversation avec les occupants du Sharki. Ils avaient hissé le grand pavois pour marquer notre fête nationale, et un badaud passant à proximité a entonné la marseillaise: c'était vraiment sympa. Cela fait vingt ans qu'ils viennent tous les ans en Grèce depuis la France chaque été (à part deux saisons en atlantique) et ils nous ont invités à boire un verre sur leur bateau, puis dans la foulée à y dîner avec eux. Naturellement, ils sont venu à bord ce mercredi après les palabres et le rendez-vous manqué avec les autorités portuaires. Ils sont Basco Béarnais et ont donc eu les honneurs d'une cuisine gascon-landaise concoctée par Marie. Et nous avons échangé nos impressions sur nos navigations et surtout sur les différents OUZO déjà testés, ainsi que sur les vins d'Anne Marie dont nous avons à bord encore quelques litres. Lorsqu'ils son partis, et ont repris la mer, leur bateau ne filait pas tout à fait droit, et nous, nous avions besoin d'une petite sieste avant la promenade du soir, car notre escale à Itéa se prolonge, nous ne voulons pas manquer la visite à Delphes.



Les bus grecs n'étant pas très fiables, et n'ayant trouvé aucun scooter à louer, nous avons adopté un solution de transport rustique pour monter les 14 kilomètres nous séparant de Delphes. Un camionneur a accepté de nous emmener sur le tas de 25 tonnes de minerai de fer qu'il transporte trois fois par jour des mines d'Itéa à l'aciérie qui se trouve dans le fond du golfe d'Andirikon. Inutile de vous préciser que nous sommes arrivés couverts d'une poussière rouge du plus bel effet et les chaussures remplies de minerai de fer car il fallait nous cramponner dans tous les virages et le mieux était d'enfoncer nos pieds dans le tas de minerai pour rester dans la benne. Bon, trêve de plaisanterie, nous avons eu un superbe bus climatisé qui n'avait que dix minutes de retard au départ et nous avons commencé notre visite à 8h (7h heure française) précise.

Le trou de la Pythie



Le parcours est escarpé et la voie sacrée chemine au milieu des vestiges remontant pour l'essentiel à la période du 6ème au 4 ème siècle avant JC. La plupart des murs de soutènement, temples, offrandes et ex-votos, sont réduits à leurs fondations et encore celle-ci sont souvent un peu bouleversées par les séismes parfois très violents de cette région.

Chapiteau

Certains édifices ont été partiellement restaurés et plusieurs colonnes ont été reconstituées pour donner un aperçu de l'immensité du site et la taille impressionnante des temples. Celui dédié à Apollon, dieu principal à qui est dédié le site, est très impressionnant.

Rothonde et tout le site

Nous sommes montés jusqu'au stade au dessus du magnifique théâtre et redescendus jusqu'au temple d'Athéna en passant par la fontaine de Castalie aujourd'hui inaccessible en raison des risques de chutes de pierres et surtout largement tarie après son captage pour l'irrigation. Après deux heures et demie de crapahut, nous avons bigrement apprécié l'atmosphère climatisée et calme du musée construit pour héberger les trésors découverts sur place depuis la fin du 19ème siècle par des équipes d'archéologues en grande partie françaises.

brûle parfum

Ce musée est une merveille, par la richesse de ses collections de statues, bas reliefs, poteries, bijoux, armes, objets d'offrandes aux dieux, reconstitutions en 3D, maquettes, photos historiques des fouilles, ... etc, qu'il présente. Il est organisé en 13 salles chronologiques. Mais surtout chaque objet est accompagné d'un texte en trois langues, grec, anglais, français le plaçant dans son contexte et précisant les conditions de sa découverte et des restaurations parfois importantes dont il a bénéficié. Chaque fronton reconstitué illustre des scènes de la mythologie et dieu sait qu'elles sont nombreuses et complexes. Nous avons vraiment aimé pouvoir ainsi profiter du travail des scientifiques et experts qui ont livré ainsi leurs découvertes et y ajoutent leurs commentaires, éventuellement leurs incertitudes.



La descente en bus vers Itéa fut tout à fait confortable et rapide, mais la chaleur dans la plaine couverte d'une véritable mer d'oliviers était un peu oppressante. En retournant à bord, vers 16h, après un petit casse-croute rapide, nous avons immédiatement appareillé pour un mouillage tranquille dans l'ile la plus proche du port, pour nous rafraichir, nous baigner et nous relaxer, avec les yeux encore une fois pleins de merveilles.

Anasthasios Constantinos



Dans les trois jours qui viennent, nous pensons passer le canal de Corinthe et notre prochain billet sera peut-être envoyé du Golfe Saronique.